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ROME ET LE MONDE ROMAIN : LANGUE, ECRITURE, NUMERATION

la langue - l'écriture - l'alphabet - la numération
La langue    

Au cours du IIème millénaire avant J.C., des populations Indo-Européennes progressèrent vers le sud et l’ouest de l’Europe. Leur langue évolua selon les régions et les populations locales rencontrées ; elle n’est pas connue de manière directe, mais elle constitue le tronc commun des nombreuses langues qui se développèrent par la suite en Europe et pour une part en Asie : langues slaves, germaniques et scandinaves, baltes, langues celtiques, grec ancien, langues italiques, sanscrit et persan en Asie, Hittite au Proche-Orient.

Dans ce qui est aujourd’hui l’Italie, les langues des arrivants évoluèrent de manières diverses entre les peuples Osques, Ombriens, Falisques, Venètes et Latins. Rappelons que la langue des Etrusques reste d’une autre origine.

Ainsi, au VIIIème siècle av. J.C., le latin est la langue des habitants du Latium, la région où se trouve Rome (qui selon la légende fut fondée en 753 av .J.C.). Ils imposèrent leur langue à mesure que leur autorité s’exerçait sur les régions voisines, mais le Latin évolua aussi à leur contact.

Tout au long de l’histoire romaine, mais surtout à partir du IIIème siècle av. J.C., la langue latine exerce une emprise de plus en plus forte sur les territoires d’Europe occidentale, en Afrique du nord et dans les régions Danubiennes. C’est la langue administrative et officielle des territoires conquis, même si le Grec reste bien implanté autour de la Méditerranée orientale.

Au cours de cette longue épopée, le latin a bien entendu évolué, et l’on distingue habituellement le latin archaïque, le latin classique et le bas-latin.
Latin archaïque
Les plus anciennes inscriptions en latin datent du VIème siècle av. J.C. Elles sont difficilement compréhensibles dans cette langue archaïque. L’historien grec Polybe, au milieu de l'époque républicaine, évoque le premier traité entre Rome et Carthage (452 av. J.C.) et déclare que le texte "ne peut que partiellement être compris, en y mettant beaucoup d'application et par les hommes les plus intelligents."

Jusqu’au IIIème siècle av. J.C., la langue évolua graduellement, mais il est difficile de savoir sous quelles influences, car très peu d'œuvres de cette époque nous sont parvenues. Il s’agit d'ailleurs souvent de textes traduits librement du grec ou rédigés à l’imitation du grec. Un Romain de l’époque impériale peut cependant encore lire la plupart des derniers textes datant de la République. On estime généralement la limite entre latin archaïque et latin classique à l’année 75 av.J.C., sans que cette date ne se manifeste bien sûr par une rupture brutale.
Pour cette période, on retiendra les écrits de Plaute, Caton l’Ancien, Térence.
Latin classique
Ce terme désigne essentiellement le latin utilisé dans la Rome impériale. La période qui va approximativement du Ier siècle av. J.-C. au début du Ier siècle après J.C., sera appelée "âge d'or de la littérature latine", avec des auteurs comme Catulle, Salluste, Virgile, Horace, Tite-Live, Ovide, Vitruve, etc.

Le premier siècle de notre ère est l’époque de Sénèque, Pline l'Ancien, Plutarque, Tacite, Pline le Jeune, Juvénal, Suétone. Cependant, à compter de l’an 20 environ et jusqu’au IIème siècle, certains considèrent que la littérature devient d’un niveau littéraire moins brillant, et l’on parle alors de "l'âge d'argent" ou "post-augustinien".
Aujourd’hui, on appelle généralement "latin classique" la langue littéraire issue du latin archaïque, dont elle s’est cependant écartée.

En réalité, au quotidien, les habitants de l'Empire romain, et en particulier à partir du IIème siècle, ont un parler bien moins littéraire, que l’on appelle le latin vulgaire et qui en diffère tant par le vocabulaire que par la grammaire et, au fil du temps, par la prononciation.

L'arc de Bénévent érigé en 114 à Bénévent en l'honneur de l'empereur Trajan.
Il porte l'inscription:
IMP(eratori) CAESARI DIVI NERVAE FILIO
NERVAE TRAIANO OPTIMO AVG(usto)
GERMANICO DACICO PONTIF(ici) MAX(imo) TRIB(unicia)
POTEST(ate) XVIII IMP(eratori) VII CO(n)S(uli) VI P(atri) P(atriae)
FORTISSIMO PRINCIPI SENATVS P(opulus)Q(ue) R(omanus)
(à l'empereur César, fils du divin Nerva, Nerva Traianus Optimus Augustus, vainqueur des Germains et des Daces, grand pontife investi de la puissance tribunitienne dix-huit fois, proclamé imperator sept fois, consul six fois, père de la patrie, prince très valeureux, le Sénat et le peuple romain).

Latin vulgaire
Appelé aussi latin populaire, c’est la langue usuelle dans les provinces occidentales de l'Empire romain. C’est lui qui a marqué les dialectes locaux jusqu’à les transformer en langues romanes. On considère que la divergence a commencé vers le IIème siècle, en s’accélérant après la chute de l’empire pour s’achever aux environs du IXème siècle.

Le latin écrit, pour sa part, resta plus proche de la langue classique sans pour autant échapper à l’influence de la langue vulgaire. Il évolua pour devenir le bas latin ou latin tardif. Du IIIème au VIème siècle, il reste la langue de l’écriture des régions romanisées, celle des lettrés et plus tard des religieux chrétiens.



L'écriture    


L’ère romaine étant la plus récente des grandes époques de ce que nous appelons l’Antiquité, l’écriture existait déjà au moment où elle commence à s’affirmer parmi les autres peuples italiques. A ce moment, les Etrusques connaissent déjà l’écriture grâce à l’alphabet que leur ont communiqué les Grecs, qui l’ont eux-mêmes appris des Phéniciens.

Les Etrusques étant parmi les plus proches voisins des Romains, et le peuple le plus puissant à la naissance de Rome (les premiers rois de Rome étaient d’ailleurs étrusques), la logique suggère que les Romains, comme d’autres peuples italiques, aient emprunté l’alphabet aux Etrusques.

Ceci bien sûr en l’adaptant, comme les autres peuples l’avaient fait avant eux, aux exigences de leur langue.

C’est probablement ainsi que les choses se sont passées, mais certains auteurs soutiennent des théories différentes.

En effet, la plus ancienne écriture latine connue est le Lapis Niger (ci-contre), une stèle du VIème siècle av. J.C., écrite en boustrophédon ("comme le bœuf trace le sillon", lignes alternativement de droite à gauche et de gauche à droite, une pratique courante à l’époque), avec des caractères très proches de ceux de l’écriture grecque.

Dès lors, on pouvait se demander si les Latins n’avaient pas emprunté leur alphabet directement aux Grecs. La colonie Grecque de Cumes était d’ailleurs elle aussi très proche de Rome.

L’argument le plus souvent évoqué qui s’oppose à cette hypothèse est le suivant.

Dans la langue étrusque, on ne distinguait pas les sons G et K ("gue" et "que") : on prononçait donc les lettres grecques Γ (gamma) et K (kappa) de la même manière.

Chez les Romains, qui faisaient la distinction, ceci entraîna une certaine confusion dans l’écriture et la lecture des noms propres notamment. Fallait-il écrire Gaius ou Caius ?

Pour lever cette ambiguïté, les Romains ont été amenés à créer une nouvelle lettre, le G, en ajoutant une barre horizontal au C qui, de son côté, faisait quelque peu double emploi avec le K.

On notera que dans notre alphabet hérité du latin, la 3ème lettre est justement le C, alors que la 3ème lettre de l’alphabet grec est le Γ (gamma). Si les Latins avaient adopté directement l’alphabet grec, ce problème ne se serait pas posé !



L’alphabet latin    


L'alphabet latin archaïque (avec différentes variantes pour chaque lettre)



Ainsi donc, dans sa première forme (archaïque), les Latins utilisaient un alphabet de 20 lettres :

A, B, C, D, E, F, H, I, K, L, M, N, O, P, Q, R, S, T, V, X

Le U se confondait avec le V.
La lettre Q peut sembler inutile, mais elle s’emploie pour former une diphtongue avec le U (exemple : Quid !).

Après quelques hésitations, le sens d’écriture fut choisi de gauche à droite, et les mots furent séparés par des points. La notion de majuscules et de minuscules ne s’établit que plus tard: dans les langues antiques, c’est souvent l’écriture cursive (manuscrite) qui s’apparente aux minuscules, alors que les "grandes lettres" sont celles de l’alphabet des inscriptions monumentales.

L’alphabet s’enrichit ensuite de 3 lettres, d’abord le G comme nous l’avons dit, dès le IIIème siècle avant notre ère, puis le Y et le Z au Ier siècle avant notre ère, des lettres utiles surtout pour transcrire des noms d’origine étrangères et notamment grecs. Selon certains auteurs, le "X" serait également venu en usage tardivement, mais d’autres interprétations sont proposées...).

Les autres lettres que nous connaissons dans notre alphabet d’aujourd’hui (J, W) sont bien plus récentes.


Le système romain de numération    

L’origine des chiffres romains a fait également l’objet de théories différentes. Il est vrai que les chiffres des Romains ressemblent à des lettres de leur alphabet, et on pourrait imaginer que si le "C" indique cent, et le M indique mille, ce n’est pas par hasard.

Et pourtant, ce sont bel et bien les Etrusques qui ont enseigné leur numération aux Romains... Pourquoi pas, d’ailleurs, puisqu’ils avaient déjà communiqué leur alphabet !
Les plus anciens "chiffres romains" sont d’ailleurs extrêmement proches des symboles employés par les Etrusques.

Admettons cependant que les dérives apportées dans le tracé des symboles pour que C ressemble à cent, et M à mille, aient pu être trouvées "pratiques".

Ainsi donc, nous connaissons 7 "chiffres" romains classiques : I, V, X, L, C, D et M.

L’écriture se fait de gauche à droite, en commençant par le plus gros chiffre, jusqu’à la dernière unité nécessaire. La lecture se fait donc par addition mentale. La notation de 5 en 5 permet que chaque signe soit présent au maximum 4 fois, puisqu’on passe ensuite au signe suivant. C’est d’ailleurs l’usage : on ne répète jamais un signe plus de 4 fois. Pour représenter un nombre supérieur à 4999, il fallait donc une autre solution.
L’écriture soustractive
L’écriture "par soustraction" est beaucoup plus tardive, et si les Romains l’ont connue, son usage ne s’est réellement généralisé qu’au moyen-âge, après quelques hésitations.

Pour écrire 9, l’écriture additive donne VIIII, alors que la soustraction (selon la règle "tout chiffre plus petit que le suivant se soustrait de celui-ci »), donne IX. On écrit deux signes au lieu de cinq, soit. Mais pour le 8, l’usage a hésité entre VIII et IIX, le gain n’étant pas spectaculaire… et de toutes façons, si cette pratique abrège l’écriture, elle ne fait que compliquer le calcul arithmétique, qui devient alors particulièrement difficile (combien font IV x XIX ???).
Et pour les nombres supérieurs à 5000 ?
Les Romains ont d’abord utilisé des signes spéciaux supplémentaires, qui présentent une certaine logique, mais ne sont guère commodes à dessiner :


Au temps de l’empire romain, d’autres solutions furent choisies : on exprimait les milliers en traçant une barre horizontale au dessus du nombre.

Pour 15 231 :

Une barre refermée aux extrémités, voire un cadre complet indique parfois les centaines de mille :


356 238 s'écrit :

D’autres sytèmes furent employés, comme écrire II.C pour 200, III.C pour 300, II.M pour 2000, III.M pour 3000, etc., ce qui revient à faire suivre le nombre d'un "M" pour exprimer des milliers.

On écrit alors: DCCCXC.M.D pour 890 500.

Pour un million, on a parfois surmonté le 1 de deux traits horizontaux.
Les fractions
Les Romains utilisaient des fractions en base 12 (1= 12 douzièmes). Ce système est plus simple que la fraction décimale pour représenter des demis, des tiers et des quarts, qui sont des "nombres entiers de douzièmes".

Le nom latin du 1/12 est "uncia", qui se retrouve dans l’unité de poids Once.

Des noms particuliers suggérant une soustraction étaient donnés à certaines fractions comme 3/4 (1 moins 1/4) ou 5/6 (1 moins 1/6) ou 11/12. On utilisa aussi des signes particuliers comme le S, le Σ, un C retourné pour 1/2, 1/24 (moitié d’once), 1/48, etc.