Dans notre lettre de mai, nous constations que les musées exposaient peu de monnaies antiques, alors qu’ils en possèdent souvent de riches collections. Est-ce parce que les visiteurs leur accordent peu d’attention ? C’est ce qu’a pensé le musée Saint-Raymond de Toulouse qui, avec son dynamisme habituel, a récemment mis en place une présentation qui pourrait changer les choses.
Constatant que les visiteurs délaissaient vite les monnaies pour se tourner, dès leur entrée dans la salle, vers la galerie des portraits en marbre, le Musée a voulu attirer leur attention sur le fait que les monnaies sont, elles aussi, des portraits. Il a mis en place, dans l’une de ses vitrines, une application informatique qui, tout d’abord, rend ces monnaies plus visibles et en souligner les points d’intérêt ; sur l’écran tactile, le visiteur peut faire défiler les monnaies, les grossir, afficher des précisions sur chacune.
Plus encore, trois des bustes de marbre ont été modélisés. Sur l’écran, le visiteur peut manipuler ces sculptures et lire d’autres informations,
et surtout, il peut les mettre en correspondance avec le portrait qui figure sur les monnaies, jusqu’à superposer les deux profils.
Du coup, l’intérêt est décuplé : on constate la ressemblance entre les visages, et l’on comprend aussitôt comment les monnaies romaines, qui portent le nom du personnage représenté, peuvent être utilisées pour identifier un buste jusque-là anonyme. Une tâche qui ne peut que séduire le détective qui sommeille en chacun de nous !
Peut-on aller encore plus loin ? Au cours des dernières années, la modélisation 3D a fait d’énormes progrès. Simulation (par exemple pour visualiser des statues antiques avec leur vraie couleur), restitution et réalité augmentée (vision des bâtiments dans leur état d’origine)…
Qui n’a pas vu un documentaire soulignant, à propos de l’illustre reine Cléopâtre, que l’on ne dispose pratiquement d’aucun portrait d’elle, si ce n’est un buste qui se trouve à Berlin, quelques représentations égyptiennes qui n’ont rien d’un portrait, et quelques monnaies?
Si l’on peut obtenir facilement un « profil de médaille » à partir des informations d’un modèle 3D, est-il possible, inversement, de « remonter » du portrait de la monnaie antique, bien identifié, à un buste 3D ?
Oui, du moins dans une certaine mesure, car l’opération demande d’ajouter des informations manquantes. En particulier, la monnaie antique représente seulement le personnage de profil, et jamais de face. On sait manipuler les visages, c’est ainsi que l’on reconstitue aussi celui d’une momie à partir de son crâne, mais la précision ne dépasse guère celle du bon portrait-robot des enquêtes policières. Ce n’est déjà pas si mal.
Ainsi, depuis une dizaine d’années, la presse nous présente « le vrai visage » de Cléopâtre, de Tout-Ankh-Amon, d’Henri IV et autres personnages mythiques, reconstitués à partir de l’imagerie de l’époque, des descriptions, des sculptures, et – lorsqu’on a la chance d’avoir pu l’identifier – de leur squelette. Et nous pourrons même bientôt les côtoyer et bavarder avec eux, puisque les lunettes 3D arrivent sur le marché…
Votre portrait en 3D ?
Les imprimantes 3D se multiplient et vous pouvez désormais obtenir une monnaie « à l’antique » ou une statuette à votre image, comme les empereurs romains !
En 2013, c’est à Toulouse (encore) que la société Digiteyezer a mis en place le premier « Photomaton 3D » français. Aujourd’hui, plusieurs sociétés vous offrent la possibilité d’obtenir votre buste ou votre figurine en pied.
Le prix de l’opération reste encore élevé (de quelques dizaines à plusieurs centaines d’euros), et si la séance de pose ne dure que quelques minutes, le traitement des données, la modélisation, la réalisation de l’objet et sa finition (parfois en couleur!) demandent un peu de patience… Mais tout de même !