Quand on évoque les inventions de l’Antiquité, on parle surtout – non sans raison – des Grecs, de leurs architectes, de leurs auteurs dramatiques, de leurs philosophes, de leur invention de la démocratie, et de leurs savants qui ont développé les mathématiques, l’astronomie, la mécanique, l’hydraulique et nombre de machines étonnantes. Alors que la plupart des autres peuples étaient plus techniciens qu’ingénieurs, plus empiristes que théoriciens, ils développaient les sciences.
On évoque aussi les Romains bien qu’ils aient peu innové, leur apport majeur étant le mortier de chaux qui a permis à leurs constructions de traverser les siècles. Plus rarement les Egyptiens et les Babyloniens, auxquels nous devons pourtant l’écriture, la roue, l’agriculture, le calendrier et les 60 minutes de l’heure, nombre de recettes médicales, la bière, le verre et tant d’autres choses.
On ne cite guère les Phéniciens que pour leur alphabet. Quant aux Etrusques, on les oublie. Et pourtant, ce sont eux qui ont enseigné aux Romains l’urbanisme, l’hydraulique d’irrigation et les égouts, l’architecture domestique et l’arc en plein cintre, les chiffres et l’écriture. L’Histoire, écrite par les Romains ou par d’autres, est injuste et manipulable.
Et « nos ancêtres les Gaulois » ?
Le cas des Gaulois est particulier, sans doute parce que, l’école républicaine étant passée par là, nous devons être fiers de ces « ancêtres ». On estime aujourd’hui, avec la plus grande satisfaction, qu’ils étaient loin d’être les barbares ignares et belliqueux décrits par Jules César, qui lui aussi falsifiait l’Histoire : quelle gloire tirerait-on à vaincre sans péril des peuples respectables!
Notre époque ne se contente pas de reconnaître aux Gaulois des connaissances en astronomie et en médecine, d’excellentes qualités d’artisans, de métallurgistes et d’agriculteurs : il faut que l’on parle de leur créativité, une qualité bien plus valorisante de nos jours.
Parmi leurs inventions les plus couramment citées, figurent des outils agricoles (moissonneuse, faux, serpe, soc métallique), le pantalon (un mot italien qui a détrôné l’appellation des “braies”, dont il ne nous reste que… la braguette et le débraillé) et, pour les militaires, la cotte de maille. Dans le domaine du transport, le fer à cheval clouté et la conception de roues très performantes. Des outils comme les tarières, l’étamage de récipients, certains briquets. Le savon lustrant et, ô combien gaulois, le couteau repliable et le tonneau.
Il faut bien reconnaître cependant que toutes ces inventions, aussi remarquables soient-elles, tiennent plus du concours Lépine que du prix Nobel. Pire encore, on serait bien en peine de trouver des inventions aussi remarquables au cours des cinq siècles qui suivirent. Nous nous sommes heureusement rattrapés ensuite.
Et patatras, voici que le plus beau fleuron de la créativité des Gaulois prend un coup dans l’aile de leur casque (qui d’ailleurs n’était pas ailé du tout, quoi qu’en dise Astérix).
Qui donc a inventé le tonneau ? Et quand ?
Le 7 avril 2017, le media italien Qui News n’hésitait pas à affirmer que les Etrusques, dès le 5e siècle av. J.-C. utilisaient des tonneaux à douves de chêne pour transporter le vin.
Il est vrai que les Etrusques connaissaient bien le vin grec et maîtrisaient les techniques de cintrage du bois pour la construction navale, comme d’ailleurs les Phéniciens et les Egyptiens. Et l’iconographie montre la présence de tonneaux en Etrurie dès le 6e siècle avant notre ère.
Hérodote mentionne aussi au 5e siècle av. J.-C. un commerce de vin par voie maritime, entre l’Arménie et la Mésopotamie, utilisant des tonneaux en bois de palmier. Pline l’Ancien situait le lieu d’invention du tonneau dans certaines vallées des Alpes, dans une région habitée par les peuples rhétiques (aujourd’hui à cheval sur l’est de la Suisse, l’Italie du nord-est et l’Autriche occidentale).
Une invention celte, donc? Si les spécialistes sont globalement d’accord sur ce lieu, il faut noter que Pline s’est trompé en assimilant les Rhètes à des Gaulois. Car les Rhètes ne sont pas des Gaulois, et ils ne semblent même pas être Celtes. En revanche, on sait qu’ils étaient apparentés aux Etrusques!
Bref, même si ce sont effectivement les Gaulois qui en on fait la gloire, vers 350 ou 300 av. J.-C., d’abord pour leur bière (la cervoise popularisée par le décidément incontournable Astérix), puis pour le vin lorsque les exportations vers Rome s’intensifient, on ne sait toujours pas qui a eu l’idée géniale de ce récipient qui nous est si cher!